Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

mardi 22 août 2017

Les non-dits d’un pays d'exception



De notre beau pays, les termes de "voyou", d'"islamisme" ou de "terrorisme" sont obstinément absents. Aurait-on la naïveté de penser qu'en niant ces termes, on occultera également les phénomènes qu'ils désignent ?  


On savait déjà que la France était un pays à nul autre pareil au regard de son histoire, de sa culture ou encore de sa situation géographique. Mais on ne savait pas encore jusqu’à quel point.


On observe à présent qu'à la différence de tous les autres pays de la planète, la France ne connaît ni la délinquance ni les voyous qui la propagent. "Voyou" est devenu, en effet, inconnu du vocabulaire en usage auprès de nos pouvoirs publics comme de nos médias. Chaque fois – c’est-à-dire, en fait, tous les jours – que se produit un « incident » du genre automobiles incendiées ou policiers agressés voire expéditions punitives contre des commissariats, les commentaires se bornent à parler de « jeunes » (entendez phonétiquement « djeunes », cela fait plus culturellement folklorique). 


Qui sont donc ces jeunes, dont on ne contestera évidemment l’âge mais dont on pourrait tout aussi légitimement se demander qui ils sont ? Alors là, pas la moindre chance, c’est le mystère absolu. La loi interdit du reste de les nommer ou de mentionner leur appartenance communautaire. Il serait pourtant intéressant de le savoir. Notez que, pour en avoir une réponse édifiante, il suffit de mettre un pied dans un palais de justice. Que découvrirait-on dans les prétoires ? Je vous en laisse la surprise que je ne puis hélas déflorer sous peine de tomber moi-même sous le coup de la loi. Pour ne pas en avoir tenu compte, Eric Zemmour fut traîné, il y a peu, devant les tribunaux (comme le fut tout aussi bien Georges Bensoussan) et reste aujourd’hui harcelé sans relâche par une bien-pensance revancharde qui n’a de cesse qu’elle ne le fasse interdire d’antenne quand elle ne l’empêche pas simplement de s’exprimer. Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! ainsi que le clamait autrefois celui qu’on surnommait  l’« incorruptible » et à qui l'on doit la Terreur révolutionnaire.

Donc, aucune mention de « voyous » dans nos médias et a fortiori pas de « racaille » n’en déplaise à un de nos anciens présidents qui, il y a quelques années, en indigna plus d'un pour avoir simplement exprimé des velléités de "karcher" à ce sujet. On en déduira logiquement que la France est épargnée par la délinquance. Gageons que notre pays de cocagne est tout autant préservé de l’islamisme, un autre tabou que personne aujourd’hui ne s’aviserait sérieusement de transgresser. Pour avoir simplement osé mentionner le terrorisme islamique au détour d'un discours, Manuel Valls, qui était alors chef du gouvernement, doit encore s’en souvenir. L’islamisme n’existe pas, qu’on se le dise, et à plus forte raison l'islamo-fascisme ! On est même sommé de les extraire de notre terminologie quotidienne. Pas d’amalgame avec l’islam, que diable ! des fois que certains esprits espiègles en aient l’idée.

Pas d’islamisme mais pas de terrorisme non plus, apparemment. Au lendemain des attentats de Barcelone, notre ministre de l’intérieur ne parlait-il pas d’« événement exceptionnel » ? Il est vrai que ceux qui s’attendraient à enregistrer un attentat à la voiture-bélier chaque jour en seraient pour leurs frais. Evénement exceptionnel donc. Pas d’affolement, bonne gens ! CQFD. Pourtant, que répondre à ceux qui estiment que nous devrons désormais nous habituer à vivre avec le terrorisme ?

Au demeurant, on n’emploie même plus le terme de « terroristes » à la radio ou sur nos prétendues chaînes d’info : vous entendrez plus volontiers à la place le nouveau vocable d’« assaillants » agréé et estampillé par la nov’langue. Ayons l’impertinence de consulter le Petit Robert à ce sujet. On y lira : « Personne qui assaille, attaque ». Sans doute sommes-nous dans ce cas de figure. Le vénérable dictionnaire a tout de même soin de mentionner à titre d’exemple « l’armée assaillante » ou encore « les soldats assaillants » donnant ainsi l’idée d’une armée plus ou moins organisée dans une guerre plus ou moins classique. La conséquence en est limpide quoique subliminale : que ne s'en était-on déjà aperçu, les assassins du Bataclan et de la Promenade des Anglais étaient tout bonnement des « soldats », comme d’autres avant eux à l'occasion de ces guerres qui peuplent nos manuel scolaires ; quant à leur cause, on présume raisonnablement qu'elle en vaut bien d’autres, relativisme oblige. Des soldats et des causes que, pour peu, on tiendrait pour respectables. Perdu ou non, un soldat mérite en effet le respect au même titre que la cause qu’il défend (d'où la substitution insidieuse du vocable de « défense » à celui d’« agression »).


La conclusion ? La France ne connaît pas plus le terrorisme que la délinquance, pour la bonne raison qu'il n’y existe point de terroristes. Désolé pour les victimes, il faut croire que les récents attentats de 2015 et 2016 n'étaient que de simples malentendus. Quant à Mohammed Merah, il n'a jamais été un meurtrier odieux auprès des « quartiers » que persiste à cajoler une certaine gauche mais bel et bien un héros authentique, quasiment une légende. 

 La preuve par neuf de ce que la France n’est décidément pas un pays comme les autres ? A Barcelone, les médias parlaient de terrorisme aussitôt après la perpétration de l'attentat. Hier à Marseille, quelques minutes seulement après la mort d’une personne écrasée dans un abribus par une voiture assassine, le Procureur de la République s’est empressé d'exciper d'un « cas psychiatrique » n’ayant évidemment rien à voir avec le drame de Barcelone … pour le cas où des esprits malveillants auraient pu nourrir de mauvaises pensées. Aujourd'hui même, Gérard Collomb a précisé qu'un tiers des fichiers de radicalisation relèvent de la psychiatrie. Sous-entendez : ces gens-là souffrent, il faut les aider. Leurs victimes ? Bah ! Des dommages collatéraux et voilà tout. Bien sûr que, parmi les terroristes, se trouvent une foultitude d'individus désaxés ou dérangés mentalement. Ne faut-il pas l'être pour épouser la cause du djihadisme ? Mais voilà, il ne s'agit pas de simples fous mais de tueurs. Et le fait de mettre en avant leur état psychique est déjà un début de théorie de l'excuse. 

Il est tout de même étrange qu'aucun pays européen touché par le terrorisme ne se soit risqué à mettre en avant la dimension psychiatrique des meurtriers. C'est à croire que les fous ont fait de la France une terre d'élection. Jusqu’où va l’exceptionnalisme français, tout de même !

lundi 21 août 2017

Tourist go home !



A force de refuser les touristes au nom d’une prétendue authenticité, voici que les indépendantistes catalans sont exaucés par les islamistes.

On ne saurait reprocher aux terroristes qui viennent de perpétrer les récents attentats de Barcelone et de Cambrils d’avoir manqué d’à-propos. Il y a quelques jours seulement, des militants de l’extrême-gauche catalane C.U.P, un parti fort d’une dizaine de membres au Parlement de Catalogne, ne manifestaient-ils pas bruyamment sur le thème : « Tourist, go home ! Refugees welcome ! » ?

Les voilà donc satisfaits et même au-delà de leurs espérances. En effet, aussi vrai qu’ils ont quitté massivement la France au lendemain des attentats du Bataclan, en novembre 2015, et de la Promenade des Anglais en juillet 2016, les touristes vont sans doute être refroidis durablement par l’Espagne. Rappel d’un simple petit détail : ce pays avait accueilli 75 millions de touristes l’année dernière.

Quant aux « réfugiés », pas de problème, ils vont continuer d’affluer avec la bénédiction des bien-pensants. Et de faire prospérer l’amalgame spécieux – mais tenu pour « vertueux » celui-là – entre réfugiés politiques, de type syrien par exemple, et migrants économiques. Qu’importe ! « Réfugié », cela sonne quand même mieux tout en présentant l’avantage d’évacuer par avance toute espèce de débat. Car un réfugié, n’est-ce pas, cela doit s’accueillir sans discussion au risque pour l’« accueillant » - à qui on s’est évidemment bien gardé de demander son avis –de passer pour un xénophobe, un « réactionnaire » ou un « ranci » selon la terminologie dominante.

Bien sûr, on aura droit dans le même temps à un florilège de tout ce que la compassion et la repentance occidentales (au fond, ces attentats, ne les avons-nous pas cherchés ?) peuvent nous offrir de meilleur : petites bougies, bouquets de fleurs et peluches garanties, sans parler des traditionnelles pancartes – dont on imagine à quel point elles peuvent être dissuasives – « menaçant » les assassins de ne pas avoir pas la haine de leurs victimes…

Et après ? « Les touristes partis », comme le chantait naguère Jean Ferrat, tout reprendra petit à petit son aspect habituel. Parce que le temps le plus vivace du deuil sera passé, parce que l’information chasse l’information et qu’un nouvel attentat ailleurs, dont les médias ne voudront pas perdre la moindre miette, aura effacé des esprits le précédent. E la nave va ! Vogue la galère ! Une galère qui persistera à pointer en priorité absolue les dangers incarnés par l’extrême-droite, auprès desquels ceux liés à l’islamisme radical ne sont que calembredaine méprisable. Une galère qui se focalisera derechef sur le risque que fait courir au monde Donald Trump, plus grave de toute évidence que celui suscité par Kim Jong Un. Une galère qui nous assénera encore et encore le refrain de l’apartheid sioniste ou des prétendues atrocités commises par les Israéliens envers les « pauvres-Palestiniens-sans-défense ».

Il n’en reste pas moins qu’à Barcelone, les touristes seront partis. L’extrême-gauche catalane, qui n’a d’égale dans le sectarisme et l’absurde que notre extrême-gauche mélenchonienne, pourra alors s’estimer comblée. On demeurera enfin entre soi, à savoir entre gauchistes, indépendantistes et réfugiés, ces « damnés de la terre » new-look que s'obstinent à célébrer sans relâche le Monde, Télérama ou Arte. Chez nous, du reste, on y rajouterait un zeste de féminisme radical voire une pincée d’anticolonialisme vintage du genre CRAN ou Indigènes de la République. Peut-être même – qui sait ? – interdirait-on de nouveau l’accès de certains cénacles aux Blancs ou aux mâles de plus de cinquante ans pour reprendre la formule désormais célèbre de madame Ernotte, dont on se demande bien au passage quand on se décidera à l'exfiltrer de France Télévision. 

Et puis après ? Tout rentrera dans l’ordre, cela va sans dire. Les élites télévisuelles pourront reprendre le fil de leurs diatribes convenues contre les vrais « ennemis de la liberté » : l’extrême-droite ou encore Zemmour, Finkielkraut, Onfray ou Bruckner. Les historiens en cour pourront reprendre leurs plaidoyers relativistes magnifiant l’« idéalisme » de Robespierre ou des communistes. Dans l’apathie générale, ils pourront poursuivre leur déconstruction du discours historique national, qualifié par Médiapart de « frileux » et de « méchant », ainsi que l’endoctrinement idéologique de nos collégiens et lycéens – via un enseignement biaisé de la colonisation et de l’esclavagisme - dans la haine de la France. 

Entretemps, outre-Atlantique, le maire de New York Bill de Blasio aura fait le ménage en escamotant la plaque commémorative datant de 1931 et consacrée à Pétain. Un escamotage assez burlesque compte tenu de l’indifférence avérée des Américains pour l’histoire quand il ne s’agit pas de la leur. Y a-t-il un Américain sur cent mille pour avoir seulement entendu parler du maréchal ou de Vichy (un lieu où, on l’oublie trop souvent, les Etats-Unis conservèrent longtemps une représentation officielle nonobstant la nature de la « révolution nationale » française) ? Ouf ! Merci M. de Blasio, d’y avoir pensé – au bon moment, qui plus est, celui de mettre en difficulté Donald Trump - et d’assainir aussi "courageusement" l’atmosphère de la Grosse Pomme. Il est vrai qu’en matière de courage, le vrai celui-là, on peut sérieusement douter qu'il arrive à la cheville d’un de ses illustres prédécesseurs, Fiorello La Guardia … 

Bref, le climat redeviendra apaisé, donc propice à un nouvel attentat de Daesh. Les militants islamistes pourraient se tordre de rire s’ils avaient le sens de l’humour. Par bonheur pour nous, leur vénération psychotique d’Allah les rend irrémédiablement hermétiques aux «  Lol » et autres « Mdr ».

dimanche 6 août 2017

De la musique ? Pas seulement




Au-delà des mots, la musique relève souvent de l'indicible et bien infortunés sont ceux, y compris parmi les êtres cultivés, qui ne savent pas en capter toute la richesse.

Une nuit d’insomnie, je suis tombé à la télé sur une rediffusion de La liste de Schindler, de Steven Spielberg. En fait, j’ai pris le film à la scène finale lorsque tous les Juifs sauvés par Oskar Schindler et leurs descendants, viennent se recueillir sur sa tombe. En arrière-plan musical, la chanson Yerushalayim shel zahav, Jérusalem d’or, qui tirerait des larmes à toute personne douée d’un minimum de sensibilité. Il va de soi que j’exclus du lot les idéologues de profession, les sectaires de tempérament ou encore les antijuifs déclarés ou hypocritement revêtus des oripeaux usés de l’antisionisme. 

Il faut savoir que cette chanson fut composée à la veille de la guerre des Six Jours, il y a une cinquantaine d’année. Elle évoquait la signification unique de Jérusalem, cette ville d’or, de cuivre et de lumière, pour les Juifs. Rappelons à tout hasard que cette ville avait été investie par les troupes jordaniennes au lendemain de la guerre de 1948 (une guerre qui avait été déclenchée par les pays arabes au lendemain de la création d’un Etat d’Israël pourtant légitimé par un vote solennel de l’ONU : le mot d’ordre des Arabes étant alors, textuellement, de « jeter les Juifs à la mer »). En conséquence de quoi elle avait été interdite à la prière des Juifs d'Israël : tout particulièrement, le lieu actuel le plus sacré du judaïsme qu’est le Mur des Lamentations, dernier vestige du temple de Salomon. Qui s’en était ému à l’époque ? Et qui viendrait à s’en émouvoir rétrospectivement ? Personne et surtout pas les médias français qui ne manquent pas une occasion de souligner que Jérusalem est la ville la plus sacrée pour les Musulmans : à ceci près que ceux-ci vénèrent aussi et surtout La Mecque et Médine et que le Coran ne cite pas une seule fois Jérusalem ; à ceci près aussi qu’il peut être espiègle de se demander pourquoi la tradition musulmane situe précisément sur le temple juif l’endroit où Mahomet se serait envolé sur son cheval ailé…

Depuis la guerre de 1967, en revanche, les Juifs disposent à nouveau du libre accès à leurs lieux de pèlerinages. Précisons à toutes fins utiles que les Juifs, pour leur part, n’interdisent nullement aux Musulmans d’accéder à leurs lieux de culte, à savoir notamment l’esplanade des Mosquées : à condition il est vrai qu’ils le fassent pacifiquement, ce qui est, on en conviendra, la moindre des choses. Mais cela n’empêchera pas les incultes ou les esprits partisans de psalmodier comme des perroquets sur la répression prétendument exercée par Israël.

Revenons plutôt à cette chanson superbe, pathétique, symbole même du talent musical des Juifs, qui est devenue « culte », comme on dirait aujourd’hui, en Israël où elle est tenue pour le second hymne national (officieux) de l’Etat hébreu, concurremment au non moins superbe Hatikva (l’espoir). Elle illustre, si besoin était, l’attachement si particulier des Juifs pour Jérusalem qui s’appelait Yerushalayim bien avant que les Romains ne tentent sans succès de la débaptiser pour Aelia Capitolina puis que les conquêtes arabes tentent d’en faire de même en la renommant Al Qods. Précisons là encore que lesdites conquêtes arabes ne s’étaient pas précisément effectuées sur un mode pacifique et tolérant. Et que l’islam avait ouvertement pour ambition de se substituer au judaïsme et au christianisme en les abolissant sinon en les délégitimant. Bien sûr, que les Juifs aient osé, des siècles plus tard, revenir sur ces spoliations, ces conquêtes et cet accaparement brutal – en achetant, quant à eux, pacifiquement les terres - paraît à certains esprits étriqués ou amnésiques le comble du scandale.

Il reste que Yerushalayim shel zahav me fait songer à une anecdote que je relate dans un de mes derniers ouvrages, consacré au cinéma italien. J’y racontais que le grand Federico Fellini se rappela longtemps de la période de l’immédiat après-guerre en Italie et de la brève présence militaire américaine. Après la période sombre du ventennio fasciste, ce retour à la liberté avait pris la forme de bienfaits matériels comme des cartouches de cigarettes américaines, Camel ou Lucky Strike. A en croire le jeune Federico, celles-ci étaient colorées et aussi douces dans leur emballage plastique que des bras de femmes. Et de commenter avec humour : « Si nous avions pu les palper avant la guerre, n’importe qui aurait compris que nous ne serions jamais les vainqueurs … »

Eh bien, pour moi, Yerushalayim shel zahav est à sa manière, par son intelligence, son esthétique et sa profondeur émotionnelle, la preuve qu’Israël ne capitulera jamais. A la fois au nom de son histoire et surtout face à des lanceurs de pierre ou poignardeurs soi-disant désespérés. Quitte à se faire éternellement traiter de « dominateur » et quelle que soit la violence de l’adversité, des jalousies, des malveillances ou de la mauvaise foi.

dimanche 28 mai 2017

Elégance (III)



Revu pour la énième fois Breakfast at Tiffany’s avec l’inoubliable Audrey Hepburn, personnification de la classe d’une époque qu’incarnaient tout aussi bien Grace Kelly, Ingrid Bergman ou encore Cary Grant. Certes, sans la musique d’Henry Mancini, ce film-culte, comme on dit aujourd'hui, n’eut sans doute pas été le même. Il n’en resterait pas moins l’élégance discrète d’Hepburn et sa désinvolture de jeune fille sage et bien née. Mais je vous parle là d’un monde …

Association d’idée quasi inévitable en ce qui me concerne, cette sophistication classieuse renvoie tout droit à John F. Kennedy qui aurait eu cent ans ce 29 mai. Une des nombreuses maîtresses qu’on lui prêta aurait dit de lui au lendemain de son assassinat : « Il a donné à l’Amérique la seule chose qui lui manquait : la majesté ». En vérité, il s’agissait moins de majesté – Franklin D. Roosevelt n’en était pas dépourvu – que d’élégance et de glamour, choses jusque-là inconnues. Inutile de s’attarder sur le charisme hors normes de JFK ou sur l’image rayonnante de Jackie. Ceux qui n’ont pas déjà compris cet exceptionnalisme ne le comprendront probablement jamais.

L’élégance, une vertu en voie de disparition ai-je l'habitude de ressasser sans en éprouver le moindre complexe, au mépris des railleries visant habituellement le « c’était mieux avant ». Et pourquoi pas, après tout ? Oui, en matière d’élégance au moins, c’était mieux, c’était beaucoup mieux avant. C’était mieux en tout cas avant Trump qui ne pourra jamais, quoi qu’il en ait, se débarrasser du sparadrap de sa vulgarité. Jusque dans sa façon de se comporter avec son épouse voire d’asséner quelque petite tape amicale et paternelle à Emmanuel Macron qui se situe à des années-lumière de ce que l’Américain représente. 

Mais il faut être équitable. C’était mieux aussi avant Hillary Clinton et son hypocrisie typiquement WASP. Elle a beau s’évertuer à nous jouer la vertu en étendard et le féminisme en bandoulière. Elle restera pour la postérité celle qui s’assit sur les infidélités de son époux, du moment que celles-ci ne contrariaient ses propres ambitions présidentielles et même les servaient d'une certaine façon. Au fond, la Claire Underwood d’House of Cards n’aurait pas fait mieux. 

Voici aujourd’hui qu’Hillary, lasse sans doute de remâcher son amertume, entend exister de nouveau en se lançant dans une comparaison fielleuse entre Trump et Nixon. Inutile de préciser pourquoi. Il est vrai qu’elle est une experte sur ce terrain. En 1973-1974, jeune et brillante avocate, elle fit partie du team juridique du parti démocrate qui  finit par arracher la démission du président Nixon avant qu’il ne fût destitué. Dans ce team figuraient des libéraux poursuivant Nixon de leur haine depuis une bonne vingtaine d’années : depuis précisément « l’affaire Alger Hiss », à l’occasion de laquelle il avait eu l’outrecuidance de mettre en cause puis de faire condamner pour espionnage un diplomate de haute volée, représentant flamboyant de l’élite « progressiste ». Les nantis ne l’avaient jamais pardonné au jeune représentant républicain qui n’avait, lui, pour seul mérite que d’avoir échappé par sa persévérance et par son talent à la pauvreté d'où il était issu. 

Dans le combat de madame Clinton contre Nixon, je ne puis m’empêcher de voir, au-delà de la justice ou d’une prétendue morale contre le Mal, la vengeance irréductible des élites contre le « petit chose ». Non, décidément, madame Clinton n’est ni sympathique, ni élégante. Je suis d’autant moins partial à cet égard que je reconnais, pour m'en louer, que son mari Bill reste, pour sa part, fondamentalement sympathique aux yeux des Américains et au-delà. A propos, lui au moins eut l’élégance de convier Nixon à la Maison Blanche afin de recueillir ses conseils politiques. Ce n’est guère fortuit. Bill Clinton fut président des Etats-Unis tandis qu’Hillary ne le sera jamais.