François
Fillon et la droite sont largement responsables des difficultés dans lesquelles
ils se trouvent empêtrés et de leur probable désastre électoral à venir.
J’ai
eu l’occasion, dans ma contribution précédente, de suggérer à quel
point dans l’affaire Fillon l’attitude des juges, notamment leur
célérité singulière, confine à un acharnement plus que suspect. A
tout esprit non crédule ou sectaire viendrait tout naturellement à l’idée que cette affaire a été sans nul doute savamment étudiée et orchestrée en amont. Elle
apparaît même trop parfaitement montée pour être le simple fruit du
hasard. Son timing interpelle tout particulièrement : à quel benêt fera-t-on croire que c'est par le plus grand des hasards que le fameux "temps de la justice" a déclenché la mise en cause de Fillon au lendemain même de la primaire de droite qu'il avait remportée haut-la-main ? N'était-ce pas à l'évidence une face de placer la droite en porte-à-faux et de lui voler l'élection présidentielle ?
Mais
il faut reconnaître aussi que la droite aura largement contribué à
creuser le bourbier dans lequel elle se trouve aujourd'hui empêtrée. A
commencer par le principal intéressé, François Fillon lui-même. Si ce
dernier n’est plus audible aujourd’hui, il n’a qu’à s’en prendre à
lui-même. Certes, il s'attache désormais, en une manoeuvre un peu
désespérée, à dénoncer l’Elysée et le cabinet noir qui a programmé sa
perte. Et que F. Hollande, l’archétype du « faux-gentil », ose invoquer
la dignité de l’action politique – lui avec son scooter comme avec ses
révélations sur ce qu’un président ne devrait pas dire – prête au
minimum sourire.
Le
drame est que Fillon a sans doute raison en dénonçant la minutieuse
machination dont il a été victime même s’il s’avérera quasiment
impossible – sauf miracle ou énième rebondissement dont cette campagne
présidentielle est cependant prodigue – de le démontrer à l’aide de
preuves irréfutables. Mais n’est-on pas fondé à lui rétorquer que lui,
Fillon, n’a pas répugné il y a quelques mois à tenter de frayer avec ce
même cabinet noir, en l’occurrence Jean-Pierre Jouyet le Secrétaire
Général de la Présidence, dans le but d’obtenir une accélération de la
justice dans les affaires visant Nicolas Sarkozy ? C’est la fable
classique de l’arroseur arrosé et il est bien connu qu’on n’éprouve
guère de compassion particulière pour l’arrosé …
En
outre, ce même Fillon n’a-t-il pas été jusqu’à se prévaloir du général
de Gaulle pour mieux discréditer Sarkozy mis en examen … avant de
reprendre sa parole et de décider de ne pas se retirer de la campagne
présidentielle après sa propre inculpation par la justice ?
Il
est clair que François Fillon s’est trop tiré de balles dans le pied
pour demeurer aujourd’hui crédible. Le seul fait aujourd’hui que nombre
de militants des Républicains déclarent voter pour le programme et non
forcément pour l’homme est plus que révélateur.
Mais
Fillon est loin d’être le seul à incriminer en ce domaine car les
responsables de son parti ne ressortent pas indemnes de ce chaos
annoncé. Il est tout de même sidérant qu’à de rares exceptions tel le
député Georges Fenech, ils se soient abrités aussi peu glorieusement
derrière le résultat de la primaire pour décider de ne rien faire. Eux
aussi portent la responsabilité du crash prévisible du 23 avril
prochain. N'existe-t-il donc pas dans ce parti au moins une personnalité
de poids pour ne pas avoir fait comprendre à Fillon qu’il allait dans
le mur et les siens avec lui ? N'y avait-il pas un seul leader doté de
l’autorité nécessaire pour faire changer de fusil d’épaule à la droite
quand il était encore temps ? Et au diable le juridisme tatillon et le
soi-disant règlement de la primaire : quand le bateau coule, on ne
brandit pas le règlement intérieur pour s'abstenir de bouger. Il est des
circonstances où l'impéritie flirte dangereusement avec une certaine
lâcheté.
Oui,
François Hollande, dont la présidence a été tellement lamentable qu’il
n’a même pas eu le courage de se représenter, a sans doute inspiré sinon
fomenté ce complot afin de faire gagner paradoxalement celui-là même
qui l'aura trahi, Emmanuel Macron : ce qui est une façon pour lui de
préserver en partie son image et pour la gauche de revenir par la
fenêtre – il n’est que d’observer l’engouement et le soulagement avec
lesquels les 'Hollandais" se reportent sur Macron - après en avoir été
chassée par la porte. Mais la droite, elle, n’a eu ni le vice ni même la
simple habileté de parer au péril qui la menaçait d'emblée. Elle est
ainsi vouée à perdre dans un mois en un "21 avril" inversé où elle
n'aura plus qu'à faire le compte de son inanité. Le drame est qu'elle ne
sera pas la seule à payer ses erreurs : le pays dans son ensemble en
subira les conséquences.
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