Il
est scandaleusement affligeant d’entendre Hollande parler de dignité,
lui qui n’a eu de cesse qu’il n’abaisse la fonction présidentielle.
Ce
qui restera à coup sûr du si calamiteux quinquennat de Hollande, c’est
cette façon si particulière qu’il a d'émasculer les faits au point que
leur signification s’en trouve souvent inversée. C’est aussi ce
maniement des mots qui aboutit à les rendre creux et ambivalents :
paroxysme ultime, sans doute, de ce relativisme idéologique qui s’est
emparé des élites de notre pays depuis les années 1968.
Un
exemple ? Le bilan que tire aujourd’hui Hollande de son quinquennat.
Certes, on peut volontiers concevoir que, chez les politiques,
l’autosatisfaction et le plaidoyer pro domo ne soient jamais
très éloignés. Mais tout de même ! Affirmer froidement, à l’encontre de
la vraisemblance la plus élémentaire, que sa fierté est de laisser la
France plus forte et plus juste qu’il ne l’a trouvée en arrivant à
l’Elysée est en soi un morceau d’anthologie.
Mais
il y a mieux encore quand cet inénarrable « moi Président » se dit
outré des propos de François Fillon, qui a eu l’audace de dénoncer un
cabinet noir élyséen, en pointant un « manque de dignité » de
l’intéressé. On peut toujours se dire, surtout en lisant l’ouvrage Bienvenue place Beauvau
auquel s'est référé Fillon et qui est littéralement accablant pour
Hollande quoiqu'en dise après coup un de ses auteurs (journaliste au Canard Enchaîné
...), que le candidat de la droite a frappé là où ça fait mal. Mais on
peut également se dire qu’Hollande restera jusqu'au bout d’un cynisme
impavide, appuyé il est vrai sur un monde médiatique qui lui demeure en
grande partie acquis. A ce sujet, on ne peut résister à la tentation de
filer à notre tour l’anaphore.
Dignité ?
Le vocable peut prêter à sourire s’agissant de Hollande. Car on parle
bien de cet homme qui, le jour funeste de son investiture en mai 2012, a
refusé ostensiblement de raccompagner dignement son prédécesseur sur le
perron de l’Elysée, le traitant comme un simple quidam et bafouant
ainsi les usages républicains ainsi d’ailleurs que la courtoisie la plus
élémentaire.
Dignité ? On parle bien de cet homme qui, après avoir critiqué le show off
de Nicolas Sarkozy, n’a pas hésité à se donner publiquement en
spectacle, lui et sa maîtresse qu’il a d’ailleurs cru bon de congédier
sans le moindre égard, comme il en serait d’une gourgandine de bas
étage.
Dignité ?
On parle bien de cet homme qui, aux dires de la maîtresse susdite et
quelles que soient ses velléités revanchardes, qualifierait avec un
mépris consommé les pauvres de « sans dents ». Du reste, comment ne pas y
croire quand on mesure le dédain insondable de la gauche caviar pour ce
peuple qui l’a portée au pinacle et qu’elle manipule à volonté. Une
gauche dont la hantise du soi-disant « populisme » n’est au fond que le
reflet de sa défiance profonde du peuple. Il est vrai que, vu du Café de
Flore ou de la place des Vosges, le peuple ... Jusqu'à certains petits
marquis qui en viendraient presque aujourd’hui à s’offusquer de ce que
le suffrage électoral de leur concierge ait la même valeur que le leur.
Dignité ? On parle bien de cet homme qui s’en va en « lousdé »,
pour reprendre le sabir de ses grands amis rappeurs des banlieues - son
électorat naturel - avec son casque et son petit scooter tromper
minablement sa légitime sitôt qu’elle a le dos tourné.
Dignité ?
On parle bien de cet homme qui, dans ses confidences aux journalistes
Gérard Davet et Fabrice Lhomme – qui les ont relatées dans leur
best-seller « Un président ne devrait pas dire ça … » - qualifie la justice « d’institution
de lâcheté... Parce que c'est quand même ça, tous ces procureurs, tous
ces hauts magistrats, on se planque, on joue les vertueux... » Au
point que les plus hauts hiérarques de l’institution judiciaire –devenue
à présent sacro-sainte aux yeux de Hollande parce qu’elle s’acharne
contre la droite - s’en sont légitimement émus à commencer par la Cour
de Cassation qui a estimé qu’il n’était « pas concevable que la charge
de président (...) puisse être utilisée par son titulaire pour
contribuer à diffuser parmi les Français une vision aussi dégradante de
leur justice". Au point aussi que l’auteur pitoyable de cette énième
« petite blague » à deux balles n’a pu faire autrement que s’en excuser.
Dignité ?
On parle bien de cet homme, dont l’humour ne fait décidément rire que
lui et les habituels flagorneurs de Cour, qui a dénigré ouvertement, en
février de cette année, la Cour des Comptes à l’occasion du pot de
départ de son ancien conseiller politique Vincent Feltesse nommé dans la
vénérable institution de la rue Cambon (à ce propos, bonjour les
recasages dans la soi-disant « République exemplaire ») : «Je
connais bien cette institution… Je l'ai choisie après l'ENA pour pouvoir
trouver le temps de faire, parallèlement, de la politique… D'ailleurs,
les membres y sont deux par bureau, pour que chaque personne puisse
vérifier que l'autre n'est pas en train de dormir.»
Là
encore, Hollande a dû s’excuser piteusement de propos manquant aussi
ouvertement de dignité, tout en n’étant peut-être pas au bout de son
humiliation. En effet, ne pouvant s’empêcher de gloser sur l'emploi du
temps prétendument allégé des grands corps de l'Etat, il en a même
rajouté une couche, bien épaisse cela va de soi : «Si à la Cour des
comptes, les membres y sont deux par bureau, pour se surveiller, au
Conseil d'État, c'est pire. Il n'y a pas de bureau. Tous les conseillers
sont au même endroit.» De quoi faire pousser les hauts cris – même dans l’ambiance feutrée qui leur est propre
– des Sages du Palais Royal. C’est au point que l’avocat Jean-Pierre
Mignard, pourtant « hollandais » de stricte engeance, a dû reconnaître
sur une radio publique (donc « amie » par définition) qu'il était nécessaire que François Hollande présente ses excuses aux magistrats.
Oui,
en un sens, Hollande est idéalement placé pour parler de dignité lui
qui en est tant dépourvu et aura travaillé avec un zèle particulier, en
cinq trop longues années, à avilir la fonction présidentielle. La
« dignité hollandaise » ? Rien qu'un lamentable et consternant oxymore.
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