Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

samedi 2 février 2013

Sémantique

Mal nommer les choses, disait autrefois Camus, c'est ajouter à la misère du monde. Sans doute avait-il raison. Mais avait-il songé à l'éventualité consistant à ne pas les  nommer du tout ?

C'est bien ce qui se passe avec "Moi, président", tout auréolé de son titre de "libérateur du Mali" faute d'être le "pourfendeur du chômage". Il aura donc fait cette guerre-éclair au Mali à seule fin d'éradiquer le "terrorisme" dans ce pays. Ce faisant, il aura réalisé le tour de force  de ne pas évoquer ce que tout le monde sait parfaitement : que ces "terroristes" sont avant tout des islamistes. Histoire de ne pas "stigmatiser" - pour user d'un mot favori de la novlangue - les Musulmans ? Au passage, cela suppose implicitement qu'il se résigne à l'identification islam-islamisme. Sinon pourquoi se priverait-il d'appeler un chat un chat ? En tout cas, son fameux "sens tactique" qui fait s'esbaudir les journalistes de gauche - même si de nos jours les termes de "journaliste" et de "gauche tendent à devenir pléonasmiques - rappelle furieusement la manoeuvre de Mme Taubira qui avait réussi l'exploit de faire condamner l'esclavage des Noirs africains perpétré par les Européens sans évoquer une seule fois les exactions perpétrées par les pays musulmans. Problème : ces pays furent (et restent encore aujourd'hui) les principaux fauteurs de l'esclavage noir, bien avant les Européens. Raison de Mme Taubira pour justifier son non-dit : ne pas indisposer  les musulmans et, chez nous, les quartiers. Ainsi trafique-t-on l'Histoire sans que personne ne trouve à s'en plaindre.

En attendant, au Mali, il est permis de s'interroger sur les buts de guerre de la France. On ne sache pas en effet que les "terroristes" aient été définitivement éradiqués. Ils se sont contentés d'éviter les troupes françaises et de se réfugier en lieu sûr, comme autrefois les talibans en Afghanistan. Ils sont donc toujours là. Qui peut assurer qu'ils ne reviendront pas un jour ? Quel aura alors été le bienfait réel dont "Moi, président" est aujourd'hui gratifié ? Etant entendu que nul n'imagine que les troupes africaines de la MISMA puissent être capables de les arrêter. 

Il en va de même pour le débat sur le mariage homosexuel. Parler de "mariage pour tous" est rien moins qu'une supercherie destinée à masquer la revendication d'une minorité gueularde. Que penser également du procès en homophobie intenté par Bernard-Henri Lévy - la "marée noire de l'homophobie ancestrale", selon BHL - et consorts à l'encontre de ceux qui ont l'impudence de s'opposer à ce projet ? Que penser du non-dit sur la GPA, découplé habilement du mariage homosexuel, alors que chacun sait que c'est la suite logique et quasi-obligée du mariage homosexuel. Et ce n'est pas parce que "Moi, président" a assuré qu'il n'y aurait pas de GPA qu'il y a lieu de le croire, compte tenu de sa propension bien connue à soutenir tout et son contraire.

D'ailleurs les médias valent-ils mieux lorsqu'ils s'obstinent à parler de "jeunes" pour éviter de désigner plus explicitement les auteurs de telle exaction et de rentrer dans des considérations très politiquement incorrectes ? Sans stigmatiser tel ou tel, pourquoi ne pas parler d'"individus" - ce qui éviterait de dénoncer une classe d'âge toute entière - ou, plus simplement encore, de "voyous" ? Sans doute ces âmes sensibles que sont les journalistes restent-elles traumatisées par le fameux "racaille" du président Sarkozy. 

Il faut leur rendre tout de même justice. Les socialistes conservent le monopole des néologismes. Au temps de Lionel Jospin, ils s'étaient déjà donné le ridicule de créer l'"auteure" ou la "professeure" qui fleuraient bon le féminisme revanchard. Les "emplois jeunes" de la fin des années 90 avaient donné lieu à un véritable festival d'inventivité ubuesque : ne songeait-on pas à dénommer les préposés au tri sélectif des déchets "ambassadeurs du tri" ? Au terme d'instituteur, qui était jadis une fierté avant que l'école ne subisse la déconfiture actuelle, les socialistes avaient préféré le titre pompeux de "professeur des écoles". Histoire de complaire à leur fond de commerce électoral.

Voici maintenant qu'une députée socialiste de Paris, qui ne se résignait sans doute pas à son anonymat, s'est mise en tête de débaptiser les maternelles pour les renommer "première école". A ses yeux, l'"école maternelle" laisserait entendre que l'univers de la petite enfance serait l'apanage des femmes. Personne ne doute que ce ne soit là une priorité cruciale. Avec des députés de ce genre, la France peut dormir tranquille. La théorie du genre, quant à elle, a encore de beaux jours et ce n'est pas l'absurde qui la tuera. Sinon, elle serait morte depuis longtemps et ceux qui s'en font les thuriféraires déjà aux oubliettes de l'histoire.

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