Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

lundi 15 juin 2015

Cela ne pouvait qu’arriver …



Les masques tombent : soigneusement entretenue jusque-là, la fiction de la distinction entre antisionisme et antisémitisme est en train de s’écrouler.

Peut-on critiquer Israël ? se demandait il y a quelques années l’essayiste Pascal Boniface, non sans une bonne dose de fausse ingénuité. La réponse allait de soi tant l’interrogation était grossière s’agissant d’un Etat tout aussi démocratique que la France : un Etat, soit dit en passant, qui est le seul Etat démocratique de la région proche-orientale.

Si la réponse était à l’évidence positive, comme si d’ailleurs l’auteur de l’interrogation susdite n’avait pas toute liberté de se la poser, les sous-entendus n’en étaient pas moins patents. En effet, les populations des pays arabes hostiles à Israël ont-ils jamais fait la différence entre les juifs en général et Israël en particulier ? Ces pays entourant Israël se sont-ils gênés dans le passé pour expulser littéralement les populations juives qui se trouvaient chez eux ?

En Europe occidentale, la fiction d’un antisionisme distinct de l’antisémitisme aura duré trop longtemps en accréditant d’ailleurs une sorte de malentendu : si, par antisionisme, certains avaient cru pouvoir formuler de bonne foi une critique de la politique israélienne, tel n’a jamais été le cas des pays arabes : l’antisionisme n’a jamais été, à leurs yeux, que la remise en cause fondamentale de l’existence même de l’Etat d’Israël donc de sa légitimité. Ces pays ne se sont d’ailleurs pas trompés sur le sens des mots dans la mesure où le sionisme est bel et bien la doctrine prônant le retour des Juifs sur leur terre ancestrale. 

Plus hypocrites, les Européens ont tenté de maintenir cette fiction qui les arrangeait. Il y eut la critique dite légaliste des « territoires occupés », comme si ceux-ci n’étaient pas la conséquence directe de l’agression arabe contre Israël en juin 1967 : qu’Israël ait gagné cette guerre en six jours ne doit en rien occulter l’origine de ce conflit qui était l’acte de guerre que constituait la fermeture unilatérale par le colonel Nasser du canal de Suez. La France elle-même n’avait-elle pas occupé la Rhénanie en 1918 afin de se prémunir d’une nouvelle agression allemande ?

Puis il y eut, à travers la question du mur de défense érigé par Jérusalem, la tentative de discréditer Israël en l’assimilant à l’Afrique du Sud raciste du temps de l’apartheid. Une telle assimilation est pour le moins spécieuse dans la mesure où Israël, à la différence de l’ancienne Afrique du Sud dont l’existence en tant qu’Etat n’a jamais été remise en cause, a impérativement besoin de se protéger contre le terrorisme palestinien ou islamiste. Enfin vint l’appel plus subtil au boycott des produits en provenance d’Israël. Les communistes, dont sait l’attachement qu’ils ont pour les libertés, y répondirent aussitôt. L’université française fit de même en restant fidèle à ses engagements pro-palestiniens.

Le dérapage, on l’a aujourd’hui avec l’appel sur Facebook d’un ancien député communiste du Val de Marne et membre actif de l’association France-Palestine, Jean-Claude Lefort, aux populations musulmanes de France. Un appel qui prend la forme d’un avertissement aux populations musulmanes : « Bientôt le Ramadan : attention à vos achats, ceci sont des feuilles de brick israéliennes, regardez en bas au centre a-t-il recommandé tout en joignant à son conseil une photo du logo de l’entreprise incriminée. Pas de chance : l’entreprise visée n’était en rien israélienne mais le logo dénoncé était bel et bien le label casher

Résumons-nous : cet ancien parlementaire, emporté par sa frénésie anti-israélienne, n’a pas supporté de devoir s’en tenir à la distinction classique antisionisme-antisémitisme et a ainsi révélé le fond de sa pensée profonde en appelant au boycott de produits juifs, qu’ils soient d’origine israélienne ou non.

Rappelons à tout hasard que ce boutefeu, qui n’est en rien isolé, a formulé son avertissement alors que les attentats de janvier sont encore dans les mémoires de même que les agressions antisémites de fin 2014 à Créteil ou encore que les rixes de Sarcelles l'été dernier. 

Soulignons également que les musulmans de France, eux, n’ont rien demandé de tel. Depuis la révélation de l’incident, Jean-Claude Lefort a pris soin de retirer la page litigieuse de son mur. Celle-ci aura tout de même eu le temps d'engendrer plus de 300 «J'aime» et nombre de commentaires assaisonnés. Conscient d'avoir attisé un feu qui ne s'éteint jamais vraiment, l'auteur de ce post affirme : « il n'est nullement question de boycott. Il s'agit d'informer chacun et chacune sur les produits en vente de sorte d'acheter ou non en toute connaissance de cause. Ni plus ni moins ». Un outil à la consommation, en quelque sorte. Ben voyons !

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