Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

jeudi 19 mars 2015

L’affaire Dutilleux ou la pureté sélective



La gauche exige de ceux qui n’appartiennent pas à sa famille une pureté dont elle dispense volontiers ses représentants.

Une fois encore, la gauche socialiste a frappé. Cette fois, il s’agit de la gauche municipale et le coup est parti de la Ville de Paris qui a cru devoir surseoir à sa décision d’apposer une plaque commémorative à la mémoire d’Henri Dutilleux. Motif : l’intéressé se verrait reprocher des faits de collaboration commis en 1942. 

En la personne de Dutilleux, ne perdons pas de vue que nous parlons d’un des plus grands compositeurs de musique français du XXe siècle dont le nom est mondialement connu. On ne le sait que trop bien, nul n’est prophète en son pays. Mais déjà, lors du décès de Dutilleux en 2013, le ministère de la Culture était resté de marbre. Sans doute le défunt n’avait-il pas l’heur de plaire à Mme Filipetti qui, comme chacun s’en souvient, avait ses têtes et une conception militante de la culture. Aujourd’hui, l’adjoint à la culture du maire de Paris, Christophe Girard, y a été d’un tweet justifiant la décision municipale, dans lequel il n'a pas hésité à comparer Dutilleux à Louis-Ferdinand Céline …

Précisons que les soi-disant « faits de collaboration » se rapportent à la commande faite à Dutilleux de la musique d’un film de propagande intitulé « Force sur le stade ». Pas de quoi ajouter à la gloire du compositeur mais pas de quoi, non plus, nourrir un tel discrédit. Aura-t-on la cruauté de rappeler qu’un ancien président de la République socialiste fut récipiendaire de la francisque, distinction remise à l’intéressé par le maréchal Pétain en personne ? Cela empêcha-t-il le bon peuple de gauche de l’élire sans état d'âme à deux reprises à l’Elysée ? Rappellera-ton également que les mensonges aussi disqualifiants que grossiers de Stéphane Hessel sur sa biographie n’empêchèrent pas la gauche parisienne de B. Delanoé de donner son nom à une place de la capitale ?

La gauche française n’a décidément pas son pareil pour exiger une pureté absolue de ceux qui ne sont pas de sa famille, tout en se permettant elle-même quelques privautés, peccadilles ou dérapages. Dans cette histoire lamentable au sujet de Dutilleux, il n’y avait vraiment pas de quoi fouetter un chat, s’agissant d’une banale plaque commémorative ! Sinon, à ce compte-là, pourquoi ne se mettrait-on pas à traquer ceux qui, parmi nos grands hommes des arts et de la culture, se firent à un moment de leur existence les partisans voire les thuriféraires inconditionnels du fondateur du goulag, Joseph Staline ? De Louis Aragon à Aimé Césaire, la liste serait longue et rétrospectivement intéressante. Mais là, il est vrai, je m’égare. J’oublie que le communisme, même stalinien, est toujours politiquement correct en France.

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