Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

vendredi 20 mars 2015

Vous êtes toujours Charlie, vraiment ?



Tout ça pour ça ! Trois mois seulement après les attentats de Paris, que reste-t-il du "je suis Charlie" ... à part le trésor de guerre accumulé par l"hebdomadaire satirique ?

Presque trois mois après les attentats de Paris, trois mois après ce qu’on nous a présenté à grands renforts de tambour et de flonflons comme un sursaut national à la française – sensé, comme de juste, donner l’exemple au monde entier - s’est soldé par un flop monumental. Faut-il s’en étonner ?

Dès le départ, il y eut trop d’ambiguïtés dans ce mouvement composite dont beaucoup ont cru pouvoir tirer profit. L’extrême-gauche et les soi-disant associations antiracistes qui espéraient détourner l’émotion populaire vers un élan antifasciste et anti-FN : comme si, par une perversion de raisonnement assez singulière, le parti de Marine Le Pen était responsable des attentats. Le pouvoir socialiste, ensuite, qui n’a pas lésiné sur le travail de récupération politique – ah ! le fameux esprit du 11 janvier … - allant même jusqu’à donner des gages à son électorat communautariste en le dédouanant à force d’imposer une symétrie fallacieuse entre antisémitisme et islamophobie : comme si ce n’étaient pas des gens se réclamant de l’islam qui avaient tué des juifs parce qu’ils étaient juifs, et comme si des juifs tuaient des musulmans.

Donc tout le monde fut Charlie, des plus petits aux plus grands, des plus sincères aux plus fourbes. Le monôme dans les rues de la capitale fut splendide, historique, Paris devenant « le centre du monde ». Les queues d’attente devant les kiosques, dans l’espoir de se procurer le numéro magique de Charlie Hebdo, le fameux collector qui sentira bientôt la naphtaline, furent tout aussi délirantes. Trop sans doute pour n’être pas qu’un feu de paille.

Qu’est-ce qui aura changé en réalité ? Apprend-on davantage la tolérance dans nos écoles ? Enseigne-t-on désormais la Shoah dans les "quartiers" ? Madame Vallaud-Belkacem a-t-elle donc changé d’avis sur le voile accompagnant les sorties scolaires ? Vous n’y pensez pas, tout de même ! Car le « Je suis Charlie » eut aussitôt pour corollaire obligé les deux mots d’ordre imposés par la vulgate bienpensante : « Pas d’amalgame ! », « Pas de stigmatisation ! »

Trois mois plus tard, donc, on en est quasiment au même point. Non, pas exactement pourtant. "Je suis Charlie" est quasiment devenu une marque commerciale qu'on nous ressert non sans psittacisme à chaque attentat : hier au Danemark, aujourd'hui en Tunisie. "Je suis Danois", "Je suis Tunisien", cela donne une impression de vague solidarité et cela ne peut faire de mal. Les nouveaux rédacteurs de Charlie, eux, en sont revenus à des thèmes supposés beaucoup plus consensuels dans notre société française : la haine de l’église catholique, de Sarkozy ou de Marine Le Pen. Pas de risque d’attentat, en effet, avec de telles cibles. D’ailleurs, le conservatisme des gens de Charlie n’a pas fini de nous étonner et pas seulement au strict point de vue éditorial. On apprend en effet que les rédacteurs de l’hebdomadaire envisagent de partir en guerre contre la direction au regard du pactole de 30 millions d’euros récoltés dans la foulée du massacre de Cabu, Charb, Wolinski et consorts. La tentation était trop grande et nos rédacteurs d’extrême-gauche, avec leurs principes, leurs valeurs et tout et tout, n’ont pas mis longtemps à y succomber. Ils ambitionneraient ainsi de devenir actionnaires du journal, histoire d’en croquer eux aussi. D’ici peu, ils deviendront de vrais capitalistes … tout en continuant de tenir un discours subversif, cela va de soi, dans la plus belle tradition bobo.

Trois mois après, seulement. Les cadavres ne sont pas encore froids mais il est à parier qu’ils se retournent déjà dans leur tombe.

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