Dieudonné
au Palais de justice de Paris : ou comment l’Etat en vient à se
disqualifier.
Scène authentique vue
au Palais de justice de Paris, il y a quelques jours à peine. Une file de gens,
longue de deux cent mètres, qui bataillent sous la canicule de juillet avant de
pouvoir être admis à l’intérieur du Palais, une fois franchis les portiques et
contrôles d’usage.
Quotidien, un tel
spectacle prête à sourire dans la mesure où cette file, composée de
justiciables pour l’essentiel, jouxte voire télescope une autre file formée de
touristes venus visiter la Sainte Chapelle. Ce qui prête moins à sourire, en
revanche, est l’arrivée inopinée de Dieudonné M’bala M’bala – celui qu’on s’obstine
encore à qualifier d’« humoriste » - qui, loin de prendre la file
comme tout un chacun, s’en va directement voir les policiers afin de pouvoir
bénéficier d’un traitement de faveur. Il faudrait tout de même voir à ne pas
confondre un artiste avec un pékin de base.
Que croyez-vous qu’il
advint ? Les policiers firent droit sans barguigner à la demande du repris
de justice. Et voilà l’intéressé admis à l’intérieur du Palais en un tournemain,
au nez et à la barbe de tout le monde. Il y eut bien quelques grincements de
dents ou quelques grognements voire quelques timides récriminations polies auprès
de la maréchaussée. Las, celle-ci fit résonner l’antienne trop habituelle :
« Je ne suis pas là pour ça » …
Qui a donné l’ordre de
réserver ce qui est à l’évidence un traitement de faveur à Dieudonné ? On
se le demande et il est à parier que l’incident restera noyé dans les méandres
d’une hiérarchie administrative plus opaque que jamais. Il est permis de présumer
que la raison d’une telle mansuétude pourrait être un risque de trouble à l’ordre
public si Dieudonné était resté coincé de longues minutes parmi la foule. Certes,
mais alors pourquoi ne pas le dire ouvertement ? Car le privilège accordé
à Dieudonné au vu et au su de tout le monde ne peut que le gonfler d’importance
et, pire encore, le conforter dans son sentiment d’impunité : en effet,
malgré toutes les condamnations qu’il traîne, l’Etat par le truchement de ses
représentants ne lui fait-il pas encore des courbettes ?
Au fond, Dieudonné joue
avec les pouvoirs publics un peu de la même façon que Tsipras joue avec l’Europe.
Pourquoi s’en priverait-il ? Moins il a de répondant face à lui et plus il
joue, se prend pour une star, non sans mettre au passage quelques rieurs de son
côté. A propos de rieur, vu à la télé lors d’une retransmission du tournoi de
tennis de Wimbledon : Nicolas Anelka, une autre « star », en
compagnie amicale de Mansour Bahrami, ancien tennisman de seconde catégorie et
présentement histrion patenté, couvé par Yannick Noah et Djamel Debbouze.
Djamel, vous savez, celui qui trouve Dieudonné irrésistiblement drôle. Noah,
vous savez, celui qui s’étonnait – pour le déplorer, n’en doutons pas un seul
instant – à l’époque où il jouait le tournoi de Flushing Meadow qu’il y eut
autant de juifs à New York.
Dieudonné, Noah, Debbouze : que du beau monde ayant pignon sur rue dans notre décidément
triste société française. Et qui vote résolument à gauche, cela va de soi.
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