Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

mardi 21 juillet 2015

Pauvre M. Kerry !



Naïfs ou plus sûrement complices de la mascarade de l’accord nucléaire avec l’Iran, les Américains devraient avoir une raison supplémentaire de ne pas remercier Obama.

Le secrétaire d'État américain John Kerry n’en finit sans doute plus de se demander dans quelle galère il a été se fourrer en acceptant de succéder à Hillary Clinton à la tête de la diplomatie américaine.

La faute à Barack Obama qui, après le fiasco manifeste d’une politique arabe définie par le tristement célèbre discours du Caire - au moment même où on lui décernait le prix de Nobel de la Paix par anticipation - souhaitait à toute force se rattraper par un acte symbolique. Cet acte, il l’a désormais avec le fameux accord sur le nucléaire iranien, le rétablissement des relations diplomatiques avec Cuba n’étant que broutilles. Un accord au forceps, cependant, qui relève soit d’une victoire à la Pyrrhus soit du simple wishful thinking.

Ainsi donc, après avoir été roulés dans la farine durant plus d’une décennie par Téhéran qui jurait ses grands dieux – avec la complicité active de l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) et de son directeur général de l’époque Mohammed El Baradei, encore un prix Nobel, encensé, soit dit au passage par la diplomatie française - qu’en matière de nucléaire, ses visées étaient tout ce qu’il y a de plus pacifique, les Occidentaux en remettent une couche dans la naïveté feinte ou, plus sûrement, dans la duplicité.

Or donc, l’Occident fait à présent semblant de croire que l’Iran ne constitue plus un danger pour la communauté internationale et qu’un consensus s’établirait aisément à ce sujet, n’étaient ces éternels empêcheurs de tourner en rond que sont les Israéliens. Seulement voilà, Israël joue rien moins que sa survie dans cette affaire – les déclarations récurrentes des dirigeants iraniens ne laissant planer aucun doute à ce sujet – tandis que les Occidentaux s’interrogent seulement sur l’ouverture d’un marché lucratif.

Alors, le mot d’ordre est d’ignorer désormais la menace iranienne et, surtout, de se convaincre que l’accord conclu le 14 juillet à Vienne par les « 5 + 1 » est de nature à prévenir toute sorte de danger. Hormis les songe-creux habituels qui claironnent que la résolution 2231 de l’ONU, qui avalise cet accord, représente « un triomphe pour la diplomatie », il reste tout de même quelques esprits lucides – parmi lesquels notre ambassadeur aux Nations Unies, François Delattre – qui s’interrogent et apparaissent nettement plus dubitatifs, incitant même ses collègues à « garder les yeux ouverts ».

Cette dernière expression en dit long rétrospectivement sur la manière qu’ont eu les Occidentaux de se jeter tête baissée dans le piège iranien qui devrait permettre d’ici peu à Téhéran de bénéficier de la levée des sanctions et, notamment, d’empocher quelque 100 milliards de dollars provenant du dégel de ses avoirs financiers. Inutile de s’interroger longtemps sur l’usage qu’en feront les ayatollahs, à commencer par le financement de mouvements subversifs, en Syrie, au Liban et bien ailleurs encore. Il est vrai que ce dégel reste théoriquement subordonné à un rapport final de l’AIEA sur ce qu’on dénomme la « PDM » (possible dimension militaire du programme nucléaire iranien). Mais il est déjà possible d’anticiper les conclusions d’un tel rapport et, du reste, les responsables onusiens se refusent d’ores et déjà de tabler sur une autre hypothèse que celle d’une levée des sanctions.

Et John Kerry ? Une semaine seulement après l’accord, la tonalité de son discours se fait plus amère, surtout en réaction aux toutes récentes déclarations du guide suprême iranien Ali Khamenei qui jurait de défier les politiques américaines dans la région. On ne sait trop s’il faut en rire mais Kerry s’est pris à juger ces déclarations « très inquiétantes » : "Je ne sais pas l'interpréter pour le moment, sauf à le prendre pour argent comptant" a-t-il dit dans une interview avec la télévision saoudienne Al Arabiya. Le pauvre, il ne sait pas comment interpréter de tels propos.

En tout cas, son patron n’en a cure pour ce qui le concerne. Il tient son « succès » et n’entend pas se le faire souffler par le Congrès américain. Ignorant sans doute que ce dernier a son mot à dire dans cette affaire – rappelons-nous la rebuffade infligée jadis au président Wilson par le Congrès républicain sur le traité de la Société des Nations – le président américain affecte de croire que le marchandage avec l’Iran est gravé dans l’airain. En somme, c’est cela ou rien.

Facile à dire, surtout à un allié israélien qui, depuis longtemps, ne nourrit plus la moindre illusion sur Obama. Ce dernier, il est vrai, entend jouer les généreux en se donnant les gants de faire miroiter en faveur de Jérusalem quelques substantielles « compensations militaires ». Or, comme le faisait remarquer Benyamin Netanyahou, qui a oublié d’être stupide même s’il est de bon ton en Europe de le vouer aux gémonies : « Si cet accord est supposé renforcer notre sécurité et celle de nos voisins arabes, pourquoi nous propose-t-on des compensations ? »

Eh oui ! Si des compensations sont dans l’air, c’est qu’on escompte bien faire avaler une couleuvre. Malgré tous les communiqués de victoire, qui ne reflètent au fond qu’un lâche soulagement, le simulacre d’accord avec Téhéran est rien moins qu’une capitulation en rase campagne. Les prochains et inévitables louvoiements de l’Iran, en matière de vérification de l’accord par l’AIEA, de même que les menaces à venir que ne manqueront pas de proférer les radicaux autour du « guide suprême », ne devraient pas tarder à nous éclairer à ce sujet. Mais le mal aura déjà été fait … La seule chose rassurante est qu’Obama se trouvera alors bien proche de la sortie tandis que Kerry, lui, s’apprêtera à retourner au ketchup si cher à son épouse.

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