Brandies
traditionnellement pour preuve de la supériorité des progressistes sur
les réactionnaires, les valeurs de gauche n’impressionnent plus grand
monde.
Ah,
les valeurs de la gauche ! Elles continuent de s’exhiber fièrement à
travers des concepts devenus usés à force d’avoir été martelés sur tous
les tons. Tournant aujourd’hui à vide, elles restent toujours
psalmodiées contre vents et marées par les gens de gauche, telles des
mantras. Comme si le monde extérieur n’existait pas et comme si
eux-mêmes n’étaient pas hors sol.
Sidérant,
pitoyable psittacisme ! Prenons par exemple l’égalité que la gauche
confond si naturellement avec cet égalitarisme niveleur qui nie le mérite et méprise l'excellence. On ne serait certes pas déçu si l’on s’avisait de demander ce
que cela signifie aux bobos parisiens qui en sont bien sûr de chauds
partisans même si, imbus de leur supériorité de classe,
ils ne s’accrochent pas moins bec et ongles à leurs chers privilèges
tout en ayant soin d’enfourcher démocratiquement leur vélo … le
week-end seulement, il ne faut pas exagérer.
La
solidarité, celle-là même qu’on nous ressert jusqu’à plus soif pour
justifier des redistributions fiscales de plus en plus insupportables
ainsi que l’omniprésence devenue ubuesque de l’Etat ? Bien sûr, là
encore, la gauche caviar est résolument pour … à condition toutefois que
les SDF ou les « migrants » ne viennent pas perturber la quiétude de leur VIIe
arrondissement de Paris – le XVIe à la rigueur, qui est conservateur et
vote à droite, peut être sacrifié et l'on y édifie d'ailleurs des baraques pour accueillir ceux de Calais ou d'autres "jungles" – ou que leur place des Vosges.
On
rétorquera, et on aura sans doute raison, que la gauche ne se résume
pas aux beaux quartiers de la capitale. Il existe bien, dans les
quartiers populaires comme en province, des militants socialistes
sincères qui se battent pour des convictions fortement ressenties et
vécues. Or ceux-ci ne sont le plus souvent que des pions anonymes,
insignifiants dans le débat politique et inévitablement voués au
suivisme. Le ton est bel et bien donné par ces patriciens de gauche qui
monopolisent le pouvoir politique, économique et médiatique, tout en
orchestrant le "prêt-à-penser".
Ce
sont bien ceux-ci et non ceux-là qui déclinent les grandes valeurs de
la gauche et en façonnent la morale. Ce sont eux qui professent, avec
une arrogance condescendante, que l’égalité comme la solidarité est bien
supérieure à la liberté ; que la fraternité, dernière composante de la
trinité républicaine, n’est qu’une aimable plaisanterie sauf pour les
francs-maçons, cela va de soi ; que l’immigration est une chance
inestimable pour la France, quel que soit le nombre des nouveaux
arrivants ou leur refus de s’intégrer dans notre société ; que
l’histoire de notre pays a débuté avec la révolution de 1789 ; que la diversité est notre ligne d'horizon et que les
racines chrétiennes de la France ne sont qu’invention ; que l’islamisme
salafiste ou des Frères musulmans n’est pas plus nocif dans le fond, et
sans doute moins, que le catholicisme sur lequel il reste bon de cracher
et contre lequel il y a lieu d’encourager les Femen, à Notre-Dame de Paris ou ailleurs ;
que la nation est un mal absolu – quitte à faire se retourner dans leur
tombe les Carnot et autres soldats de l’an II – qui est d'ailleurs le terreau du nationalisme ; que les
frontières sont pareillement détestables ; qu'il n'est de justice que
sociale ; qu’Alain Finkielkraut et Michel Onfray incarnent la réaction
droitière à la fois « rance » et « nauséabonde » ; qu’il est légitime
d’interdire d’antenne, voire de droit d’expression tout court, Eric Zemmour ;
qu’enfin le populisme - sous-entendons le peuple qui ne vote pas à
gauche et ne devrait sans doute pas se voir octroyer le droit de voter -
n’est rien d’autre que du fascisme déguisé.
Telles
sont en gros les opinions de gauche, à connotation morale puisqu'elles
convoquent le Bien, le Bon et le Juste, qui nous sont quotidiennement
assénées par des médias complaisants ou peu regardants en matière de
réflexion critique. Cette éthique socialisante, si elle vise à
l’exemplarité comme toute morale, ne va pas sans véhiculer un double
problème.
Le
premier d’entre eux est lié à la fameuse prétention à l’exclusivité des
valeurs de gauche. Non seulement celles-ci se veulent universelles mais
elles dénient à toute autre valeur le droit de cité. La morale
religieuse ? Seulement un produit déplorable de l’archaïsme et de
l’obscurantisme, même s'il faut affecter, pour mieux le fustiger, d’en être revenu aux
jours sombres du petit père Combes et de la lutte entre l’Eglise et
l’Etat. Le retour à la tradition ? Une simple réaction d’attardés
mentaux, inaptes à saisir la modernité comme le progressisme. D'ailleurs, comment peut-on être à ce point débile qu'on ne comprenne pas que les
crèches de Noël dans les mairies sont plus dangereuses que les
prières musulmanes débordant (j'évite sciemment "envahissant" qui a déjà
valu à Mme Le Pen d'être condamnée par notre excellente justice) sur la
voie publique parisienne ?
Il
s’ensuit un comportement singulièrement dangereux des moralistes de
gauche en termes de sectarisme et d’intolérance, voire des réflexes
carrément autoritaristes : soit de type léniniste suivant lesquels tout
est permis pour assurer le triomphe des progrès et de la lumière ("lumière" au
sens Jack Lang et non pas des Encyclopédistes du XVIIIe siècle …), la
fin justifiant décidément les moyens ; soit de type Robespierre-Saint
Just, « pas de liberté pour les ennemis de la liberté ». C’est ainsi que
la gauche de Christiane Taubira et de Manuel Valls a réprimé en toute
bonne conscience La Manif pour tous qui s’est vu privée du
droit élémentaire à l’expression (et tant pis pour les droits de l’homme
qu’on ne marchande pourtant pas aux islamistes ou à la moindre minorité
sexuelle ou ethnique). C'est ainsi que Najat Vallaud Belkacem, après avoir travaillé à imposer la théorie du genre à l'école, y a tout de même introduit l'enseignement de l'arabe et y a éradiqué le latin et le grec. C’est ainsi que la gauche de Marisol Touraine
entend à présent réprimer les élus qui ne se conforment pas
rigoureusement aux canons de LGBT : dernière manifestation en date, la
ministre vient de saisir la justice contre des municipalités qui
n’acceptent pas que certaines affiches dans les rues, sous couvert d’une
campagne contre le Sida, cherchent à imposer l'homosexualité comme
norme commune.
C’est
ainsi, accessoirement, qu’on ne s’émeut guère au parti socialiste que
des gens de gauche s’en aillent polluer la primaire de la droite en
allant faire barrage par leur vote, moyennant deux euros par tête, hier à
Nicolas Sarkozy et peut-être demain à François Fillon. Certes,
objectera-t-on benoîtement, la primaire est déclarée « ouverte ». Mais
il s’agit en l’occurrence d’une question élémentaire de morale qui
devrait à tout le moins donner des scrupules aux gens de gauche - entre 350 000 et 600 000 électeurs, selon les estimations - de s’immiscer déloyalement dans le
débat de la famille de droite qui ne les concerne guère. Or ceux-ci n’ont cure de tels scrupules et s’assoient
allègrement au passage sur la « Charte de l’alternance » de la droite
qu’ils n'ont pas hésité à signer sans la moindre vergogne. La signature ? La parole donnée ? La
loyauté dans tout cela ? Voir la simple honnêteté ? Des broutilles à leurs yeux, simplement des valeurs de droite quand ce ne sont pas des
valeurs ringardes ou vides de sens à l’heure du relativisme.
Morale de gauche, nous dit-on ? Il
faut cesser de nous bassiner, pour rester poli, avec toutes ces fadaises après Dominique Strauss Kahn et sa façon si particulière - seulement "libertine" nous assure la gauche bienpensante - de considérer la femme. Après Jérôme Cahuzac et ses comptes en Suisse et à Singapour.
Après Thomas Thévenoud, l'homme qui prétend souffrir de phobie
administrative, surtout si cela peut lui éviter de payer ses impôts ou
son loyer. Après François Mitterrand, ce président qui eut une double
vie privée financée par les deniers publics et en a même fait – sous le
regard attendri de certains de nos intellectuels – un genre littéraire.
Après François Hollande qui s'empresse de tromper sa compagne à la sauvette, avec scooter et casque, sitôt qu'elle a le dos
tourné (les féministes apprécieront la classe du personnage). Après Christiane Taubira, première
Garde des Sceaux mais aussi première titulaire du poste à avoir un fils
en prison. Après Marisol Touraine qui, elle aussi, a un fils derrière
les barreaux (pour escroquerie et chantage envers une personne âgée).
Après Laurent Fabius dont le fils a tout autant maille à partir avec la justice et manie les millions d'euros d'une manière aussi douteuse que son père administre les leçons de morale ou de convenance. Après Laurent Joffrin qui, aveuglé par une haine qui ne s'est point apaisée avec le retrait de Sarkozy, piétine aujourd'hui la mémoire des victimes des attentats
islamistes en osant comparer François Fillon à Tariq Ramadan. Après Cambadélis et Harlem Désir qui ont déjà été sous le coup d'une condamnation pénale, après Kader Arif, contraint de démissionner en catastrophe du gouvernement, qui pourrait l'être prochainement ...
Après
un tel florilège, sans préjudice de ce qu'on pourrait bien découvrir ou exhumer dans un avenir proche,
que reste-t-il des valeurs morales passées, bien réelles celles-là,
d’un Jean Jaurès ou d’un Léon Blum ? Plus grand-chose si ce n’est des relents fort peu ragoutants, quoique toujours efficaces politiquement,
d'intolérance crispée. Si ce n’est également ce viatique paraphrasant
André Laignel, le légendaire maire socialiste d’Issoudun dont le cynisme était inversement proportionnel à la taille : vous avez
moralement tort parce que vous êtes idéologiquement minoritaire…
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