Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

dimanche 17 mars 2013

Charisme

Il y a longtemps que le vocable est galvaudé. Jadis, le charisme était la caractéristique de personnages exceptionnels en raison de la puissance de leur personnalité et de leur capacité de rayonnement. Aujourd'hui, la sous-culture journalistique aidant, il s'adresse au moindre clampin sortant un tant soit peu de la grisaille ambiante. Mais passons ...

Depuis quelques jours, la question du charisme rencontre une problématique d'un genre inédit avec les premier pas du nouveau Souverain Pontife, le pape François : le charisme relève-t-il de l'inné ou résulte-t-il d'une stratégie de communication pertinente ?

Bien sûr, il y a lieu de se méfier des a priori et des premières impressions qui peuvent s'avérer fallacieuses. Mais voilà un homme, Jorge Mario Bergoglio, qui n'a pas de véritable présence au sens où on l'entend d'artistes de scène. Il n'est pas Jean-Paul II et ne dégage pas cette impression de vitalité physique qui émanait de sa personne dès l'abord. Il n'est pas non plus Jean XXIII ou même Jean-Paul Ier qui suscitèrent d'emblée la sympathie tant par leur simplicité que par leur sourire dévastateur.

A le voir s'avancer un peu gauchement sur le devant de la loggia ouvrant sur la place Saint-Pierre, peu après le fameux "Habemus Papam", on aurait pu avoir l'impression d'un homme austère à mi-chemin entre l'intellectuel et l'apparatchik.On se serait trompé. Tout en étant d'une intelligence fine rehaussée par son éducation jésuite, le pape François n'est pas un pur esprit comme l'avait été son prédécesseur le pape Benoît. Aussi ne commettra-t-il pas si facilement d'impair politique. Peu familier de la Curie, il n'est pas davantage un bureaucrate et l'on attend les premières escarmouches avec une administration vaticane particulièrement sourcilleuse de son pouvoir.

Au fond, le nouveau pape François est un pragmatique qui semble avoir compris d'entrée de jeu la vérité de sa fonction, à savoir l'importance décisive de l'image. Le Vatican, on le sait, ne possède ni "divisions militaires" comme ironisait jadis Staline, ni puissance économique. Il lui reste l'influence spirituelle et l'utilisation intelligente de l'impact médiatique, surtout en un temps où l'église catholique traverse une crise de confiance sans précédent.

D'où le style simple, direct et redoutablement efficace qu'a donné le nouveau pape à sa communication, comme s'il avait fait cela toute sa vie. Et c'est cela précisément qui étonne le plus : sa maestria à entrer dans sa fonction - qu'on songe par comparaison aux difficultés pitoyables qu'éprouve le chef de l'Etat français à en faire de même, près d'un an après son élection - et la rapidité avec laquelle il construit son image. Le pape François semble avoir fait sienne cette loi dite des cent jours édictée par Roosevelt, qu'il met remarquablement en pratique par des discours clairs, des mots simples et par une inflexion particulière sur la modestie et la pauvreté. Sans avoir l'air d'y toucher, il se met personnellement en scène et n'hésite pas à solliciter la sympathie des fidèles en leur demandant constamment de prier pour lui. Il faut le reconnaître : c'est du grand art, tout particulièrement pour un néophyte. Le nouveau pape construit ainsi méthodiquement un charisme qu'on ne devrait pas tarder à lui reconnaître... Urbi et orbi.

Il y a une trentaine d'années, on qualifiait le président Reagan de "grand communicateur".  En sa qualité d'ancien acteur hollywoodien, il avait cela dans le sang. Avec le pape François, c'est tout autre chose. Cet homme n'est pas né communicateur mais il a compris d'instinct le caractère vital, pour son pontificat comme pour l'avenir à court terme de l'église, du contact et de la transmission ainsi que de l'image. Il sait déjà beaucoup de choses et ce qu'il ne sait pas, il l'apprend vite. Ceux qui le tiennent déjà pour un pape de transition ne tarderont pas à en être pour leurs frais. 

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