Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

vendredi 3 avril 2015

Le lâche soulagement



Comment qualifier autrement ce sentiment de satisfaction qu’affichent ceux qui, Barack Obama en tête,  ont participé à l’accord sur le nucléaire iranien ?

On nous rabâche parfois tellement certaines commémorations ou leçons tirées de l’histoire qu’on finit par en perdre le sens ou la signification. Il en va ainsi de Munich, cette conférence de septembre 1938 à l’issue de laquelle les Occidentaux franco-britanniques capitulèrent honteusement face aux exigences d’Hitler, sacrifiant au passage la Tchécoslovaquie.

Retour de la capitale bavaroise, Edouard Daladier, le chef du gouvernement français, s’attendait à être lynché par la foule qui s’était précipitée à l’aéroport du Bourget…pour le porter en triomphe ! Le leader socialiste Léon Blum parla, quant à lui, de « lâche soulagement » et il avait raison contre ceux qui estimaient que la guerre était le pire de tous les maux, quitte à y abandonner au passage son honneur. 

De nos jours, un tel sentiment a encore la vie dure mais là n’est sans doute pas l’essentiel sur le dossier iranien. Vis-à-vis de Téhéran, il y a des lustres que les Occidentaux ont capitulé mentalement devant les mollahs. On se souvient que l’exécrable président Carter sacrifia délibérément le Shah, qu’il jugeait affreusement répressif, pour ouvrir une voie royale à son adversaire de toujours, l’ayatollah Khomeiny. A aucun moment de la crise iranienne de 1979, il n’eut la lucidité de comprendre la tragique réalité de l’islamisme et ouvrit en toute naïveté la boîte de Pandore. Il faut croire que son absence de vision était cruellement partagée car on lui décerna par la suite le prix Nobel de la Paix !

Non, Jimmy Carter ne fut pas le seul à s’être fourvoyé car, chez nous en France, le président Giscard d’Estaing avait déjà ouvert toutes grandes à Khomeiny les portes d’un exil politique doré et complaisant, à Neauphle-le-Château. VGE ferait même mieux en faisant affréter, aux frais du contribuable français, un avion pour ramener triomphalement en Iran le futur dictateur.

Un beau bilan en vérité, mais les tristes sires capitulards eurent des héritiers lorsque, à l’aube des années 2000, l’Iran se mit en tête d’acquérir l’arme nucléaire. Sur le fond du dossier, qui ne voit le danger ? L’argument suivant lequel l’ambition iranienne serait légitime compte tenu, notamment, de ce qu’Israël possède déjà la bombe ne tient pas une seule seconde. Israël n’a jamais menacé ses voisins avec son arme, à la différence de l’Iran qui, à la moindre occasion, promet de rayer Israël de la carte. Il n’empêche que les Occidentaux, à l’époque, auront fait preuve envers l’Iran d’une passivité confinant à la complaisance voire à la complicité. Rappelons-nous à quel point, à l’époque, Jacques Chirac affecta de croire aux conclusions du directeur général de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique), El Baradei qui  jurait ses grands dieux que l’Iran n’avait rien à se reprocher et développait un programme uniquement civil. S’en souvient-on ? Baradei, lui aussi, eut le prix Nobel mais on sait qu’il mentait et que les Iraniens étaient en train de développer un programme tout autre.

Mais tous ces gens sont battus à plate couture, hélas, par le président américain Obama. Au début de son mandat, on se demandait s’il serait un nouveau Carter ou un nouveau Clinton. Cela fait déjà longtemps qu’on connaît la réponse : le pas encore regretté mais déjà si regrettable président Carter n’aura pas été et de loin aussi nuisible qu’Obama. Qu’on se rappelle ce désastreux discours du Caire par lequel le président américain aura donné le signal des soi-disant « printemps arabes », déstabilisant durablement le Maghreb comme le Machrek. Et pour quel bénéfice ? On se pose aujourd’hui la question par antiphrase. Mais il y a pire en la matière. En bon Américain, Obama n’aime pas l’Europe et ne comprend d’ailleurs pas grand-chose aux affaires du Vieux continent, comme le démontre à satiété le traitement de la crise ukrainienne. Il n’aime pas davantage Israël et mérite bien, en ce sens, son second prénom, Husain.

Nos faiseurs d’opinion en Europe donnent inébranlablement à Obama le beau rôle, comparé à Netanyahu qui est définitivement jugé sectaire. Toutefois, à l’égard du dossier nucléaire iranien, n’est-ce pas le premier ministre israélien qui a raison ? Pour des raisons encore indéterminées, Obama voulait à tout prix un accord avec l’Iran. Ayant oublié depuis longtemps d’être bête, les Iraniens ont compris qu’ils avaient tout à gagner dans cette histoire. D’où ce pseudo-accord du 1er avril – cela sonne, en plus, comme un « poisson d’avril » - qui soulève davantage de problèmes qu’il n’en résout.

Il faut être, en effet, d’une myopie singulière pour ne pas comprendre que l’Iran d’aujourd’hui, à l’instar d’Hitler autrefois, ne respectera pas une seconde l’accord en question et n’abandonnera jamais son ambition d’un nucléaire militaire. Lorsque les Occidentaux finiront par le découvrir – à supposer qu’ils ne s’en doutent déjà pas – cela sera très largement trop tard. Cet accord s’identifie donc à une capitulation en bonne et due forme. On ne doute pas que les Européens, avec leur bonne conscience si impavide, fermeront les yeux sur le plus que probable non-respect par Téhéran des clauses de l’accord. En revanche, on imagine que ces mêmes Européens rivaliseront d’indignation si, un jour, Israël devait bombarder unilatéralement les sites nucléaires iraniens, comme il le fit en Irak en 1981.

En attendant, l’Occident incarné par Obama – et il n’est pas certain cette fois que la France, à commencer par Laurent Fabius, s’en satisfasse – patauge dans ce même « lâche soulagement » que dénonçait hier Léon Blum. Conclusion : il est temps que Barack Obama, qui ne laissera pas d’autre trace dans l’histoire que d’avoir été le premier président « noir » américain, s’en aille. Je le supposais jusque-là mais j’en suis à présent totalement convaincu : les historiens du futur réévalueront à la baisse les mérites d’Obama voire – qui sait ? – réévalueront dans la foulée ceux de son prédécesseur George W. Bush.

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